Zïlon (Raymond Pilon) – Une Légende du Street Art Québécois
Né en 1956 à Laval, Raymond Pilon, mieux connu sous le nom de Zïlon, laisse derrière lui un héritage indélébile dans le monde de l'art. Considéré comme une figure de proue du mouvement punk underground montréalais des années 70 et 80, Zïlon fut également l’un des pionniers du street art québécois, propulsant cette forme d’art et son esthétique sur la scène internationale. Le 28 juillet 2023, le monde de l’art québécois a perdu une de ses figures majeures, un créateur dont l’influence continue de marquer les générations.
Au début de sa carrière, Zïlon se fait connaître sur la scène musicale punk de la métropole montréalaise. Cependant, un accident survenu lors d’une performance — où un piano lui tombe sur la main — l’amène à changer de direction. Cet événement le pousse à exprimer sa fougue et ses émotions autrement que par la musique. C’est ainsi qu’il trouve sa voix visuelle et crée son fameux visage, devenu emblématique, qu’il dessine et renouvelle à travers ses œuvres. Ces visages, peints sur des canevas, du papier, du bois et même sur les murs de Montréal, se multiplient, se superposent et se fragmentent pour raconter les émotions d’un homme, d’une génération, et d’un mouvement qui l’a porté.
Zïlon, que l’on qualifie souvent de « père du street art québécois », a vu dans ce mode d’expression un moyen d’allier ses passions pour la culture underground, le design, et les revendications sociales. Sa vision artistique, portée par une énergie punk jamais perdue, lui permettait de métaboliser la culture populaire et d'en faire un langage unique, une signature personnelle inimitable. Ses œuvres sont devenues des fragments de son propre portrait, redéfinis à travers chaque ligne, chaque couleur, et chaque impulsion créative.
Ses collaborations avec des artistes et des marques internationales témoignent de la portée de son art. Il a travaillé avec des figures emblématiques comme Gilles Carle, Jacques Languirand, Robert Lepage, Wajdi Mouawad, et Claude Péloquin. Zïlon a aussi participé à des événements d’envergure tels que le Festival de jazz de Montréal, le Festival international mode et design de Montréal, et le Festival du film sur l’art. Sa créativité n’a pas connu de frontières, de Paris à Tokyo, ses œuvres ont trouvé leur place dans des lieux prestigieux et dans des projets innovants. Parmi ses collaborations notables, on compte la peinture de vêtements pour le défilé de Philippe Dubuc à Paris en 2003, des œuvres pour le lancement d’une gamme de maquillage de Givenchy en 2013, ainsi que des éléments décoratifs pour le jeu vidéo Far Cry New Dawn en 2018. Il a également créé une murale pour le théâtre le Diamant à Québec en 2019.
Le style distinctif de Zïlon, à la fois provocateur et sensible, se distingue dans toutes ses œuvres, qu’elles soient petites ou monumentales. Ses visages sont le reflet d’un monde intérieur complexe et de la turbulence de sa génération, mais aussi d’une énergie créative inépuisable. Zïlon n’a jamais cessé de repousser les limites de l'art, que ce soit par ses peintures murales ou ses installations immersives, déjà présentes dans ses travaux au milieu des années 80.
En dépit de sa renommée internationale, Zïlon est resté un homme profondément humain, sensible et attaché à ses racines. Ses proches et amis se souviennent de lui non seulement comme un génie créatif, mais aussi comme un ami fidèle et un être profondément généreux. Son ami et collaborateur Vincent Beauchamp a exprimé son admiration et sa gratitude pour l’opportunité de travailler avec lui, soulignant l'impact durable que Zïlon a eu sur sa vie et celle de nombreux autres.
Zïlon préparait une nouvelle série intitulée VANDALE DE LUXE II et travaillait également sur une collaboration avec l'artiste Patrick Pépin. Il était aussi en pleine préparation d’un livre sur son œuvre. Malheureusement, ces projets inachevés demeurent comme un témoignage de son énergie créative et de son influence indélébile sur l’art contemporain.
Les œuvres de Zïlon continuent d’être présentées dans des expositions à travers le monde, et son impact sur le street art reste incalculable. Sa vision, son talent et sa rébellion artistique perdureront à travers ses œuvres et la mémoire de cet artiste iconique. Le monde de l'art québécois a perdu une légende, mais son héritage perdurera à travers ses œuvres et l’inspiration qu’il continue de susciter.
Merci, Zïlon, pour tout ce que tu nous as laissé. Tu nous manques profondément.