Une âme pour muse
« Je n'ai jamais voulu être artiste, mais c'est le plus beau cadeau que m'ait offert la vie. Je souhaite que mon art fasse du bien. Je passe mon temps à désirer le beau, c’est devenu une obsession ».
Nos chemins sont façonnés par l’inconscient, à 80%. Née en 1986, Astrid Lucketti, aujourd’hui artiste peintre, prit soin de poser l’attention sur ses ressentis, ses intuitions, ses rêves tandis que son émerveillement pour la nature - son inspiration majeure - n’eût de cesse de l’animer. « L’être humain ne comprend pas vraiment ce qu’il lui arrive en étant humain. C’est pour cela qu’il a besoin de tout codifier », confie celle pour qui la chose académique est bien souvent trop ennuyeuse. Jeune adulte privilégiant l’instinct au mental, elle choisit d’étudier l’architecture et le design. Issue d’un milieu familial initié aux arts et à la suite de ses expériences de vie, Astrid Lucketti se demanda ce qui lui était essentiel. C’est ainsi qu’elle décida d’embrasser, à son tour, cet univers du merveilleux.
L’emboîtement
Astrid Lucketti s’en fut à la rencontre d’elle-même. À la rencontre de l’enfant qu’elle était et de ses talents d’artiste. Nourri de rêves d’évasion, son art est protéiforme : peinture, sculpture, tatouage, photographie, street art. Les thématiques abondent : l’énergie, la lumière, les fluides, la dualité omniprésente du monde, la spiritualité et une récurrence : la notion de liberté.
L’or et le noir sont les couleurs phares, motrices de l’artiste, symbole de lumière d’une part et d’inconnu d’autre part. Le blanc, que l’on retrouve beaucoup également dans le travail d’Astrid, porte en lui l’innocence et la sagesse. Enfin le bleu, quatrième couleur privilégiée, est promesse de vérité.
Nombre d'œuvres de l’artiste n’ont pas de nom. Pourquoi les enfermerait-elle encore davantage ? « Il m’est difficile de nommer, cela ne m’amuse guère. Poser un verbe revient à mettre une boîte sur quelque chose ». Astrid vous dirait que l’on aime s’emboîter dans la vie, et qu'on en a besoin. École, entreprise, famille, pays, langage… Notre liberté est enfermement : le corps, la respiration et la nature même de la vie, notre passage sur Terre en tant qu’âme. Ainsi, « Je préfère laisser les personnes nommer elles-mêmes mes œuvres. J'adore les regarder et les écouter lire mes réalisations, selon leur point de vue, leur propre imaginaire ».
Le temps des points de vue
La notion de point de vue, de position et d'action est part intégrante à l'œuvre d' Astrid Lucketti. Selon l'artiste c'est une concordance directe avec notre façon d'être. C'est ainsi qu' elle œuvre à ses créations selon trois procédés. Astrid Lucketti contemple la beauté qui nous entoure. Par l'art photographique, elle nous capture le mouvement, l'instant fugace, éphémère. Par ses réalisations picturales d'atelier, elle crée le mouvement. Au sol, bras et pieds nus, ayant pour outils principaux des cuillères en argent et ses mains afin de ressentir les matières : peinture, carton, papier, métal ou bois. Le carton, matière issue du recyclage, représente le temps qui passe « C’est comme si je peignais sur une bibliothèque », sourit-elle. Les modifications de la forme de la matière par la peinture (ondulations), ponctuées par de nombreuses phases de séchage entre les différentes strates, correspondent à l'évolution de l'être humain. Pour ses réalisations street art Astrid Lucketti considère son outil privilégié qu'est le spray comme une métaphore du souffle de vie.
D'après l'artiste il est indispensable d'oser regarder, pour voir, percevoir et rencontrer ses couleurs, ses propres ambivalences afin de vivre, de savourer consciemment les richesses qui nous submergent.
Manifeste de l’intuition
L’artiste s’amuse à s’autosurprendre, son âme est sa muse. Elle s’en âme-use, vous dirait-elle, car l’art est un accès direct à la source de l’intuition. Lorsqu’elle crée, Astrid peut atteindre d’autres états de conscience. Des semaines durant, ses œuvres germent dans son inconscient. Les jours qui précèdent l’accouchement de l’idée, c’est le grouillement, le bouillonnement. Puis soudain, le lâcher-prise et le jaillissement… intuitif. « Je ne réfléchis pas, je fais à l’instinct », affirme-t-elle. La musique retentit et dans une transe méditative, presque hypnotique, l’artiste laisse accueillir ce nouvel état de conscience. Astrid peint l'énergie qui nous anime.
Dans sa quête alchimique du divin, elle apprit, aussi, à travailler en extérieur : « J’ai besoin de grands espaces. Avec ces nouvelles contraintes, j’ai découvert une autre liberté ».
Devant Yves Klein, l’artiste s’arrête, émerveillée : « Ses réalisations me permettent d’être immobile ». Dotée d’une perception fine, son regard s'immobilise, elle apprécie le détail et, dans une certaine forme de plénitude constante, comprend que le beau est partout.
Souvent, les artistes ont cette capacité de percevoir de façon non intellectuelle la réalité du monde qu’ils transmettent dans leur art en offrant des messages et en permettant d’accéder à un autre état de conscience. Le spectateur, alors touché par l’œuvre, pourra percevoir cette réalité-là, la comprendre, la faire sienne, jusqu’à ressentir une forme de vérité.
Astrid Lucketti offre un voyage singulier vers un ailleurs lumineux.